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Bayeux. Un sarcophage aux inscriptions "exceptionnelles" découvert à la cathédrale

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Cécile

Cécile de Seréville et Gaël Carré, archéologues, se réjouissent de cette découverte à 2,5m de profondeur dans la cathédrale de Bayeux (Calvados). Ils travaillent dessus depuis la mise au jour de ce sarcophage fin octobre 2018, mais il reste encore beaucoup de questions sans réponses, et donc d’études à mener. (©La Renaissance le Bessin)

C’est une découverte des plus intéressantes. La première du genre à la cathédrale de Bayeux (Calvados). Un sarcophage datant de l’époque médiévale a été mis au jour dans le cadre des travaux de mise en accessibilité de l’édifice. La DRAC de Normandie (Direction régionale des affaires culturelles) pilote en effet depuis octobre 2018 un chantier visant à installer une plateforme élévatrice sous les marches (en contrebas de la nef, à proximité de la crypte) afin de permettre aux personnes à mobilité réduite de faire le tour du chœur.

« Il fallait creuser. Mais on ne s’attendait pas à trouver grand chose ici », explique Jérôme Beaunay, le conservateur de la cathédrale. « C’est une zone qui a été pal mal chahutée au XIXe siècle lors de la pose d’un pilier qui a nécessité la reprise de fondations ». Et pourtant, les archéologues y ont découvert des vestiges du Moyen Age, dont un robuste sarcophage en calcaire, qui pourrait peser près de 2 tonnes.

Un couvercle qui ne correspond pas à la cuve…

Un sarcophage particulièrement intéressant. Car s’il n’est pas rare d’en découvrir sous de tels lieux de culte, celui-ci revêt deux particularités notables. La première concerne « son couvercle, aux décors caractéristiques de la période mérovingienne (qui daterait donc du VIIe ou du VIIIe siècle après J-C), qui ne correspond pas à la cuve. Et il est brisé en deux, ce qui va dans le sens d’une réutilisation du sarcophage », détaille Gaël Carré, du service archéologie de la DRAC.

Il est vraisemblable qu’entre le VIe et le VIIIe siècle, il n’était pas à cet emplacement, et qu’il a été réutilisé plus tardivement, vers le Xe ou XIe siècle.

Un réemploi qui semble être confirmé par la fouille de la sépulture puisque deux individus (au moins), y ont été retrouvés. « On a le squelette d’une femme dont les os du bassin relativement bien conservés nous laissent penser qu’elle avait une quarantaine d’années. Et il y a également un deuxième sujet, dont l’inhumation semble antérieure, dont on ne peut pas déterminer le sexe pour le moment », décrypte Cécile de Seréville, du Centre de recherche archéologique et historiques anciennes et médiévales (CRAHAM), basé à l’Université de Caen (Calvados).

Ce sont les prochaines études, notamment par le biais des relevés ADN effectués, qui permettront d’en savoir plus. Des dents vont par ailleurs être analysées, et elles pourraient appartenir à d’autres personnes « puisque à cette époque, cela arrivait très régulièrement que des sarcophages soient réutilisés à maintes reprises au cours du temps ».

A LIRE AUSSI : Bayeux, théâtre du plus grand projet de création de vitraux dans une cathédrale en France

…Et un nombre d’inscriptions « exceptionnel »

Mais ce ne sont pas ces ossements, « qui pourraient appartenir à des membres du clergé mais aussi à des notables », qui font la deuxième véritable particularité de cette découverte. Ce qui la rend si attrayante pour les spécialistes, ce sont les nombreux graffitis sur la cuve. « Cela arrive d’en trouver, mais ils sont généralement petits et peu nombreux. D’avoir autant d’inscriptions, c’est vraiment exceptionnel », assure Cécile de Seréville.

Pour l’heure, les archéologues ne peuvent voir que ceux gravés à l’intérieur et sur les bordures de la cuve, celle-ci étant toujours encastrée dans le sol. Mais déjà, ils révèlent des choses très intéressantes :

Il y a des petits personnages gravés dans la pierre, et beaucoup d’armes, d’instruments, d’outils. Sur les deux parois, cela fait comme une sorte de bande dessinée qui relate une histoire. Et surtout, ce qui nous a beaucoup intéressé, c’est qu’il y a tout un texte sur les bordures qui pourrait être médiéval et qui pourrait désigner un ou deux destinataires de la cuve.

Pour aller plus loin dans leurs recherches, la Fabrique de Patrimoines va faire des relevés en photogrammétrie, qui permettront, à partir des différences de coloration, de mettre en lumière des détails invisibles sur des photographies traditionnelles : « Quelques relevés ont déjà été faits et ils nous donnent une idée du potentiel d’étude de ces inscriptions anciennes », se réjouit Cécile de Seréville, qui s’est chargée de la fouille. 

De nombreuses inscriptions, bien visibles, ornent la cuve du sarcophage découvert dans la cathédrale de Bayeux (Calvados). Comme ce nom qui pourrait donner des indications sur

De nombreuses inscriptions, bien visibles, ornent la cuve du sarcophage découvert dans la cathédrale de Bayeux (Calvados). Comme ce nom, « Uberto », qui pourrait donner des indications sur l’identité de l’une des personnes enterrées dans ce sarcophage. (©La Renaissance le Bessin)

Une sépulture « pillée » au 19e siècle ?

Une fouille qui n’a rien donné en terme de trouvaille d’objets. Ce qui intrigue les archéologues : « Dans des sépultures antérieures au VIIIe siècle, on devrait trouver du mobilier associé à l’individu. Des bijoux, des boucles de ceintures, des armes… Là, il n’y a rien ». Mais ils ont peut-être l’explication :

Il y a un trou sur l’une des parois qui doit dater de la période où des travaux ont été faits dans cette zone au XIXe siècle. Des personnes ont pu fouiller dans la cuve pour essayer de récupérer des objets, ça expliquerait pourquoi les ossements de la femme que l’on a retrouvés étaient si éparpillés. Et l’on a retrouvé une feuille de papier brûlée à l’intérieur. On imagine donc bien le geste des personnes qui ont percé la cuve pour voir ce qu’il y avait à l’intérieur.

Mais ce n’est qu’une théorie, « parce que normalement, dans le cas de pillage, on retrouve très souvent quelque chose. Là, même dans le fond de la cuve, on n’a pas trouvé de trace de métal, de bronze ou de quoique ce soit d’autre ».

Cela reste donc pour l’heure un mystère. Un mystère parmi de nombreuses autres questions encore sans réponse. « L’étude est encore en cours. On reviendra sans doute nous archéologues refaire des observations en début d’année 2019, et on va aussi lancer toute une série de datations scientifiques, afin d’essayer de dater les inhumations et les maçonneries pour tenter de comprendre comment s’organisent ces éléments archéologiques en terme de chronologie », explique Gaël Carré.

Les travaux de mise en accessibilité de la cathédrale de Bayeux (Calvados), ont permis de mettre un jour un sarcophage datant probablement du 7e ou 8e siècle après J-C.

Les travaux de mise en accessibilité de la cathédrale de Bayeux (Calvados), ont permis de mettre un jour un sarcophage datant probablement du 7e ou 8e siècle après J-C. (©La Renaissance le Bessin)

Un sarcophage qui sera exposé au public

Dans les semaines à venir, le sarcophage sera sorti de terre pour poursuivre les investigations sur les inscriptions, notamment sur ses parois extérieures. « Et ensuite, elle aura vocation à trouver une autre place dans la cathédrale pour être vue du public », assure Jérôme Beaunay. 

L’installation de la plateforme élévatrice repoussée

Par ailleurs, cette découverte implique forcément un retard dans l’installation de la plateforme élévatrice pour les personnes à mobilité réduite. « Les travaux devaient être terminés pour Noël, ce ne sera pas possible. Ils le seront pour Pâques ». 

LIRE AUSSI : La cathédrale de Bayeux, en plein chantier sur l’accessibilité


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