
Au second plan, le futur terminal 4 de Roissy-Cdg, dont le chantier doit sortir de terre en 2020, pour un coût de 7 à 9 milliards d’euros.
Aéroports de Paris (Adp) s’apprête à lancer la construction d’une nouvelle aérogare T4 à Roissy-Charles-de-Gaulle. 40 millions de voyageurs supplémentaires sont prévus d’ici 2035.
Initialement, Chantal Jouanno, présidente de la Commission nationale du débat public (Cndp), avait suggéré qu’un tel projet passe par un débat public.
Ce sera finalement une concertation, conduite par Adp, qui sera proposée à la population. En raison du grand débat national, la consultation sur l’extension de l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, qui devait se dérouler du 7 janvier au 7 avril, a été reportée au 12 février.
« Alors que l’extension se déroule à l’intérieur de l’aéroport et qu’il n’y avait pas d’obligation réglementaire, nous avons, tout de même, souhaité contribuer à cette concertation. Nous avions initialement prévu des réunions publiques, des ateliers participatifs, des stands mobiles, avant que ce projet ne soit soumis à la Commission nationale du débat public et à l’autorité environnementale. Une extension du périmètre prévu a été demandée », explique François Charritat, directeur délégué aux relations territoriales et environnementales pour Adp.
La consultation s’étendra au-delà des communes concernées par le plan d’exposition aux bruits et la loi sur l’eau, soit 178 villes.
Désormais, la consultation est ouverte à 450 communes. Paris, une partie des Hauts-de-Seine, le Confluent dans les Yvelines, la Seine-et-Marne, mais aussi l’arrondissement de Senlis (Oise) sont concernés.
« Nous ne connaissons pas de projet pour lequel une concertation soit aussi étendue », souligne le cadre d’Adp.
Dix réunions publiques auront lieu en Île-de-France, dont deux à trois dans le Val-d’Oise. La première aura lieu le 12 février à Gonesse, puis le 19 février à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), le 20 mars à Saint-Soupplets (Seine-et-Marne), le 25 mars à Eaubonne et le 6 mai au Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne). Elles seront complétées de quatre à cinq réunions supplémentaires.
« Notre objectif est de recueillir le maximum d’observations sur les craintes des riverains mais aussi sur les opportunités, au regard des élements qui nous sont déjà remontés, en termes d’emploi et de facilité d’accès qui pourraient être améliorés », espère François Charritat.
Les conséquences
Attendues des riverains de l’aéroport, les réunions prévues seront suivies par les associations qui défendent les intérêts des habitants concernés par les nuisances aériennes.
« Nous irons à la rencontre des habitants », annonce Françoise Brochot, présidente de l’Advocnar, principale association de défense de riverains autour de Roissy-Cdg (lire ci-dessous).
« Il faut associer l’extension du terminal 4 de Roissy-Cdg avec le projet voisin d’EuropaCity et leurs conséquences sur le climat. On s’évertuera à prouver qu’il s’agit du même sujet. Nous comptons opposer le projet du T4 à ses conséquences sur la population environnante de Roissy », explique Vincent Gayrard, des Amis de la Terre, association qui s’oppose au projet d’aménagement d’un méga centre commercial et de loisirs sur la zone du Triangle de Gonesse, le programme EuropaCity, qui avait fait l’objet d’un débat public.
« On ne peut pas monter de tels projets en les dissociant », martèle Vincent Gayrard, alors que la consultation sur le T4 débutera à Gonesse.
Le bruit et l’odeur
Au-delà de l’agrandissement de Roissy-Cdg, la concertation, vue par les riverains, portera surtout sur les nuisances occasionnées par le trafic aérien.
« Qu’Adp construise une nouvelle aérogare c’est son droit. Ce que l’on demande c’est moins de nuisances », revendique l’Advocnar.
Avec une hause de 38 % du mouvement aérien programmée à Roissy d’ici 2034, il y aura une augmentation de la pollution aérienne.
« Certes, les concepteurs d’avions étudient la fabrication de réacteurs moins émetteurs de monoxydes de carbone (Co2). Pour autant, les nouveaux réacteurs produisent plus d’oxydes d’azote (NOx). Un nouveau procédé appelé Open rotor permettrait de consommer moins de carburant, mais comme le moteur est ouvert, il fait plus de bruit », craint-on à l’Advocnar.
« L’extension du trafic aérien de Roissy-Cdg doit aussi relancer la question sur la taxation du kérosène », souligne Vincent Gayrard.
Autant d’arguments qui poussent les associations de défense des riverains à demander une baisse du trafic aérien dans un secteur particulièrement peuplé et où l’impact sanitaire sera concerné par une augmentation des vols.
Une récente cartographie, réalisée par BruitParif, a démontré que les zones où « la santé est perdue à cause du bruit » sont principalement situées sur les secteurs limitrophes des aéroports.
Une réduction moyenne constatée de dix-huit mois de bonne santé en raison du bruit des avions. Les riverains de Roissy n’ont pas fini de voir leur santé menacée par le trafic aérien.
Françoise Brochot, présidente de l’Advocnar.
Que savez-vous déjà des conséquences de l’aménagement de Roissy-Cdg avec l’extension du T4 ?
Adp a évalué l’impact à 500 mouvements de plus par jour. Actuellement, il y a 1 300 avions/jour. Avec le T4, en 2035, ce trafic passerait à 1 800 vols/jour. Le milieu aérien vante la construction d’avions moins bruyants, mais si l’on augmente le nombre de vols, on augmente aussi la gêne occasionnée par le trafic, au-delà de l’indice du bruit. Le mouvement aérien répété, c’est une source d’angoisse et de stress au-dessus de la tête. Or, ce que l’on demande c’est moins d’avions et de nuisances. Nous constatons que les grands aéroports des Émirats, de Turquie et surtout de Chine, sont en plein développement. L’extension de Roissy est en contradiction avec la tendance actuelle qui est au déplacement par liaisons directes, sans passer par des aéroports internationaux. Le hub de Roissy est en perte de vitesse et Adp veut rattraper son retard, aux dépens des riverains !
Cette concertation est une première en ce qui concerne un aménagement de l’aéroport de Roissy-Cdg. Comment accueillez-vous cette démarche d’Adp ?
Hélas, nous regrettons qu’un tel projet ne passe pas par le débat public. Cependant, la loi prévoit une concertation préalable. Ainsi, Adp (Aéroport de Paris) assure vouloir offrir les meilleures conditions à cette démarche, en donnant la durée la plus longue, de trois mois avec, tout de même, un garant. La Cndp (Commission nationale du débat public) ayant estimé, compte tenu de l’impact environnemental du projet, qu’il fallait même désigner quatre garants.
Qu’attendez-vous de cette concertation ?
Nous estimons que le dispositif présenté est sous-dimensionné. Le périmètre de concertation retenu par Adp, se limitait au Peb de Roissy (Plan d’exposition aux bruits). Nous avons demandé d’étendre cette zone à l’indicateur de bruit Lden 45 qui s’étend jusqu’à la zone du Confluent de l’Oise et de la Seine, qui n’entre pas dans le périmètre du Peb. Pourtant, le secteur de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) est touché par le bruit des avions. De plus, Lden 45 s’inscrit dans les nouvelles normes de bruit retenues par l’Oms (Organisation mondiale de la santé) et promulguées en octobre 2018. Ce périmètre a été évalué par BruitParif. Nous savons qu’il correspond aux remontées de mécontentements des riverains touchés par les nuisances de l’aéroport. Cependant, Adp restera sur son périmètre, mais étendrait les consultations dans la zone que nous préconisons.
Comment comptez-vous intervenir lors des réunions ?
Nous avons déjà obtenu des réunions supplémentaires. Initialement, seulement deux réunions publiques étaient prévues. Une dans le territoire Roissy-Pays de France et l’autre en Seine-Saint-Denis. Nous avons donc suggéré une réunion en Vallée de Montmorency et deux autres dans le secteur du Confluent et en Seine-et-Marne. Il n’est pas exclu qu’une réunion se tienne également dans le Parisis. Notre demande semble entendue par Adp. La consultation doit aussi se dérouler sur Internet, mais nous avons demandé que des documents papier puissent être déposés dans les mairies. Des cafés débats seraient également envisagés par Adp. Enfin, le Bus du Terminal 4, qui s’est déjà arrêté dans des communes, referait une nouvelle tournée. Nous espérons qu’elle s’étende. Notre principal objectif, c’est que la population participe à ces réunions.